Pour un leadership aéronautique en Bretagne

Résumé : La question d’une fusion (?) ou d’une répartition de trafic entre les aéroports de Nantes et Rennes est posée par la presse régionale et envisagé par le Président de la Région Bretagne. L’ADARB donne ici son analyse mais évoque le vide politique et organisationnel breton qui obère toute action coordonnée propre à désenclaver la Bretagne. Elle suggère d’autres alternatives adaptées et acceptables par l’ensemble des  organisations et publics concerné.

Si l’idée d’une fusion ou d’une répartition du trafic peut sembler lumineuse à certains, l’ADARB pose les questions suivantes : Quelles autorités peuvent s’emparer de cet objectif et convaincre les deux parties. L’Etat, la Bretagne, les Pays de Loire, les métropoles, les actionnaires, les gestionnaires ?

La région Bretagne : si elle en avait envie, serait-elle en mesure d’infléchir le géant nantais en sa faveur ? Avec quelles contreparties ? …On s’étonne de voir la Région Bretagne inclure Nantes dans sa stratégie régionale (OF du 03/01/24)

Les Pays de Loire : quel intérêt pour eux d’une fusion avec l’aéroport breton ? Peut-on imaginer les nantais se délester d’une manne économique pour l’offrir à leur rival rennais ? C’est là faire preuve de naïveté (et on est poli). 

Tel un Deus ex machina, L’Etat peut-il imposer la fusion ou répartir le trafic  entre les deux aéroports (à l’instar des pays à l’économie planifiée) ? Comment pourrait-il reprendre les commandes à Rennes comme à Nantes ? En rachetant l’aéroport de Rennes à la région ? D’une humeur soudainement jacobine la Région Bretagne veut-elle voir l’Etat la remplacer ? Dans le contexte où tout le monde est jaloux de ses prérogatives régionales, cette option n’est guère imaginable. 

En fait de naïveté, la Région Bretagne devrait se garder d’un arbitrage de l’Etat. Actuellement celui-ci serait beaucoup plus enclin à limiter à une dizaine le nombre d’aéroport en France… et Rennes disparaître au seul profit de Nantes. 

Sauf à perdre son indépendance, c’est donc à la Région Bretagne de prendre pour elle-même les initiatives en matière de politique aéronautique régionale.

Sérieusement et partant du fait que grâce à son offre étendue de destinations, l’aéroport de Nantes-Atlantique attire vers lui plus 1,2 million de bretons tous les ans, l’ADARB considère que le point de départ d’un rééquilibrage du trafic entre Nantes et Rennes serait plus naturellement une augmentation de l’offre au départ de Rennes. Ainsi, les rennais et habitants du 35, 53, 50, 56 et 22 préféreraient s’envoler de Rennes et, par conséquence, soulageraient l’aéroport nantais et ses riverains.

Pour l’ADARB, augmenter l’offre et donc augmenter le trafic passagerau départ de Rennes c’est réduire sensiblement le transport terrestre – émetteur de Co2 – et les risques d’accidents routiers entre Rennes et Nantes. C’est contribuer à réduire la charge de l’aéroport de Nantes, et pour les compagnies aériennes la possibilité de mieux respecter du couvre-feu à Nantes. 

Nul besoin de s’abandonner dans la fusion ou de réguler le marché autoritairement, il saura s’adapter car les bretons et les ligériens iront prendre l’avion au plus près et au moins cher

Augmenter l’offre à Rennes conduirait à diminuer une bonne part de l’encombrement nantais et des travaux à entreprendre sur l’enceinte de l’aéroport nantais. L’Etat y ferait une grosse économie, l’écologiste verrait diminuer les taux de Co2 et le risque d’accidents  sur la route entre Rennes et Nantes. Ainsi les retombées économiques sur le bassin de Rennes iraient croissantes.


Que propose l’ADARB ?

L’ADARB continue inlassablement à faire quelques suggestions allant dans ce but dont le principal est l’investissement : 

Investir 

Pour à la fois :

Augmenter l’offre de nouvelles lignes, judicieusement choisies, à Rennes sans solliciter la contribution – irréaliste – des nantais. Il conviendra d’accueillir une à deux bases de compagnies à « bas coût » avec des avions faciles à remplir au départ (Airbus A319 par exemple ou bien CRJ de 100 places).

Attirer ou accepter des compagnies adaptées au marché rennais en évitant des doublons sur des destinations voisines. Parmi celles-ci, on peut citer par exemple Vueling, Eurowings qui n’ont pas de base dans l’Ouest ou Amélia compagnie française au réseau commercial encore peu développée ou bien d’autres comme la toute nouvelle compagnie bretonne Celeste qui, avec ses avions de 100 places, est bien adaptée à la demande rennaise. 

Retenir (par une politique d’incentive) leur présence sur le tarmac pendant au moins trois ans pour qu’une demande suffisante accroche. 

Aligner le prix du carburant sur ceux pratiqués par leurs concurrents,

Pratiquer une taxation plus attractive en abaissant leurs coûts,

Communiquer aux agences de voyages : certaines ignorent en général les destinations au départ de Rennes. Elles dirigent leurs clients, par habitude, vers Nantes.

Reporter les travaux d’aménagements de l’aérogare. L’ADARB a déjà montré que l’aéroport de Rennes peut accueillir sur son tarmac plus d’un million de passagers sans investissements majeurs. En l’état, il n’y a pas d’urgence pour agrandir l’aérogare et quand il sera l’heure, l’intendance suivra. 


Qui doit investir ?

L’Etat qui est en passe d’investir 250 M2 € à Nantes ? 

La Région Bretagne ? On se perd en conjecture à propos de l’argent public qu’elle investit (1,5 million d’euros/an) pour soutenir les vols euro-méditerranéens à Brest alors qu’il n’en est rien à Rennes dont la zone de chalandise et le potentiel d’exploitation y sont  bien supérieurs. Il conviendrait que l’Etat ou la région ou les actionnaires investissent à Rennes au moins autant qu’à Brest.

La SEARD à la capacité d’investir grâce à ses réserves financières et sa rentabilité comme nous l’avons moult fois évoqué. 

A Vinci notamment de faire des efforts si cet opérateur veut se voir confier le renouvellement de la concession en 2025. (Pour l’instant l’aéroport de Rennes n’est pour Vinci qu’un simple centre de profit au moindre coût tandis que cet opérateur concentre le principal de ses investissements et du trafic à Nantes)

Par ailleurs, il faut noter que la société d’exploitation de l’aéroport de Brest s’est lourdement endettée pour accueillir la compagnie Volotéa qui se doit d’assurer la rentabilité de plus de treize destinations internationales. L’ADARB s’interroge sur qui, en cas de difficultés, compensera les pertes d’exploitation ?… 


Pourquoi rien de ceci n’est envisagé à Rennes-Bretagne ?

En fait l’ADARB a acquis depuis quelques années la conviction que les actionnaires (Vinci et la CCI) de l’aéroport de Rennes n’avaient plus la volonté de développer leur entreprise. Mais, en lieu et place, avaient pour unique objectif celui d’améliorer leur marge et leurs dividendes par la réduction de leurs charges et l’abandon de toutes sortes d’incentive (investissement).  De même l’attitude indolente des responsables de la métropole rennaise face à leur aéroport, est l’expression typique d’élus jouissant d’une bonne fortune héritée de leurs prédécesseurs et devenus spectateurs indifférents au lent déclin de leur cité… 

Conclusion : Pour mettre en œuvre une politique de désenclavement aérien il manque à la région Bretagne un vrai leadership détaché du souci de sa réélection, capable :

– d’imposer une vue régionale des transports aériens régionaux, 

– déléguer à une autorité régionale le soin de coordonner et de fixer des objectifs spécifiques aux aéroports bretons,

– et, comme le propose le CESER, de confier les vols euro-méditerranéens aux deux principaux aéroports bretons, Rennes et Brest. 

C’est pourquoi, l’ADARB propose au Président de la Région Bretagne, Monsieur Chesnais-Girard, de missionner une société sous le statut juridique d’une Société Publique Locale (SPL) pour organiser une véritable politique aéronautique dans l’intérêt général de la Bretagne. Cette société publique serait en outre assez puissante pour fixer des objectifs et pour négocier, s’il le fallait des accords avec ses voisins ligériens.